jeudi 14 janvier 2010

Pile ou face (partie 7)

En remontant à mon studio, je repensais à ce que Fabien m’avait dit plus tôt dans l’après-midi. Comment avait-il fait pour voir ce que j’essayais de dissimuler de toutes mes forces ? Peut-être avait-il simplement dit ça comme ça, sans savoir s’il taperait dans le mille ou non. Quoi qu’il en soit, j’avais immédiatement répliqué qu’il se trompait sur moi, que je me sentais tout sauf seule. Tout le baratin qui m’était venu à l’esprit sur le moment somme toute.
J’espérais vraiment qu’il se sortirait vite cette idée de sa tête. Je n’avais quand même pas quitté tout ce que je connaissais pour rester la même personne insipide que j’avais été jusque-là. C’était tout simplement hors de question. Je préférais largement le mener en bateau, tant pis.
Je retournais encore ces pensées dans ma tête quand je m’endormis cette nuit-là.
Le lendemain, j’arrivais sans encombre à ma station de métro et marchais tranquillement jusqu’au bâtiment de mon école, où l’on me remit mon emploi du temps et les salles où j’avais cours le jour même. Je croisais Samir dans un couloir et nous nous rendîmes compte que nous avions cours ensemble tout le semestre. Nous avions même choisi les mêmes options.
Vers 18h, alors que je me dirigeais vers la sortie, j’aperçus une affiche qui retint mon attention. C’était le flyer d’une soirée qui aurait lieu en fin de semaine, pour fêter le début de l’année universitaire. C’était exactement ce dont j’avais besoin pour m’intégrer rapidement et ainsi, prouver à Fabien qu’il se trompait sur mon compte.

mercredi 2 septembre 2009

Pile ou face (partie 6)

L’amphi du matin était passé à une vitesse effarante, probablement parce que je n’avais aucune envie de retrouver ma prison perchée. Quand Fabien me rattrapa à la sortie, c’est donc tout naturellement que j’acceptais d’aller prendre un verre avec lui.
Fabien était le benjamin d’une famille de trois enfants. Il avait deux sœurs et s’était donc toujours senti un peu isolé. Tandis qu’il me parlait de sa vie, j’essayais de m’en inventer une à toute vitesse. Je n’avais aucune envie de l’ennuyer avec ma petite vie tranquille d’exploitée de service. Vite, vite ! Une idée !
« Alors et toi ? Tu as des frères et sœurs ? ».
Et là, le déclic s’est fait : je n’avais qu’à dire ce qui me passait par la tête ! C’était très facile ; il suffisait simplement que je me souvienne de tout ce que je lui dirais pour ne pas commettre d’impair par la suite.
« Non, je suis fille unique. Je le regrette parfois, je me suis toujours demandée ce que ça faisait d’avoir un frère ».
Note à moi-même : Quoi ???? Je raconte vraiment n’importe quoi.
« Eh bien, je me propose comme frère de substitution ! »
Je ne pus retenir un rire étouffé : « Tu te rends quand même compte qu’on ne se connait que depuis ce matin, n’est-ce pas ? ».
« Je sais reconnaître une personne seule et perdue quand j’en vois une, même si elle se trouve au milieu d’une foule ».
Mon début de rire mourut immédiatement dans ma gorge. Comment avait-il pu voir si juste ?

mardi 21 avril 2009

Pile ou face? (partie 5)

Une petite cigarette pour se donner une contenance et se fondre dans la masse, on inspire et on y va. Je me présente en deux mots à mes interlocuteurs silencieux : « Salut. Nicole, 21 ans ». La mécanique est lancée :
« Fabien, 23 ans ».
« Carole, 22 ans ».
« Antoine, 20 ans ».
« Samir, 23 ans ».
Tout le monde commence à évoquer ses années prépa, les concours et compagnie. Je tire un peu plus sur ma clope pour me concentrer sur les paroles de chacun. Il n’y a rien de sorcier à se faire des amis : la règle d’or est de savoir que les gens aiment qu’on leur parle d’eux et surtout qu’on les fasse se sentir plus important qu’ils ne le sont en réalité. Votre vie, ils n’en ont rien à foutre. Alors, on se concentre : le chien d’unetelle s’appelle Choupette, la sœur d’un autre s’appelle Sandra. Les minutes passent et le groupe gonfle à mesure que les élèves arrivent. Je prétexte une envie pressante et m’éclipse à l’intérieur du bâtiment pour m’entendre penser à nouveau.
« Hé attends ! » j’entends derrière moi. Fabien m’avait suivi et me tendait un petit papier : « C’est mon numéro. On sait jamais, si tu as une soudaine envie de parler à quelqu’un à trois heures du mat, ça se pourrait que je décroche ». Je l’ai regardé s’éloigner un sourire en coin, satisfaite de ma popularité subite. Je vous avais bien dit que c’était facile de se faire des amis ! ;D

dimanche 8 mars 2009

Pile ou face? (partie 4)

Ma tête ballotait doucement au gré des secousses du métro. Mon installation la veille dans ma petite chambre avait été brève mais elle m’avait épuisée et je n’avais même pas eu la force de déplier le canapé qui me tenait lieu de lit pour dormir. J’avais compté qu’en deux petites enjambées, le tour de ma chambre était fait. La minuscule douche plantée à côté d’une petite lucarne laissant filtrer une petite bise et les toilettes sur le palier avaient achevé de me saper le moral. J’efforçais de ne pas trop y penser tandis que les stations me séparant de mon arrêt défilaient. Aujourd’hui c’était mon premier jour de cours et je devais faire bonne figure. On dit que c’est la première impression qui compte, n’est-ce pas ? Et j’étais bien déterminée à la rendre la meilleure possible.
Les portes du métro s’ouvrirent et vomirent un flot de passagers avant que je me rende compte que je devais descendre à cette station. Pestant intérieurement, je me dis qu’après tout je marcherais un peu, ça me changerait les idées. Je sortis du métro en traînant les pieds, essayant de ne pas prêter attention aux battements de mon cœur résonnant dans ma tête.
J’arrivais enfin dans la rue de ma nouvelle école. Un petit attroupement était déjà là, tout le monde se jaugeant du regard sans oser décrocher le moindre mot. La première impression je vous dis !
J’accrochais donc un sourire magnifiquement hypocrite sur mon visage et me jetais dans l’arène. C’est parti !